COMMUNIQUE DE PRESSE
La capitale togolaise abritera du 20 au 24 juin 2016, une réunion de haut niveau des Chefs des délégations de l’Union Européenne en Afrique de l’Ouest suivi d’un dialogue avec les présidents des commissions de la CEDEAO et de l’UEMOA sur la stratégie de coopération entre l’Union Européenne et la sous-région ouest-africaine. L’honneur conféré à Lomé d’abriter pour la première fois une telle réunion sur le sol africain, alors qu’elle avait généralement lieu à Bruxelles, appelle la société civile togolaise à se faire le porte-voix des populations ouest-africaines pour appeler à un dialogue sincère entre les représentants européens et les premiers responsables de notre sous région. La coopération entre l’Europe, et l’Afrique se trouve en effet à un tournant décisif qui nécessite de la part des autorités africaines un langage de vérité avec l’Union Européenne.
Depuis le sommet de La Valette tenu en novembre 2015, l’Europe ne cesse d’instrumentaliser la coopération au développement au détriment de la mobilité des citoyens de la communauté ouest-africaine. Le fonds fiduciaire de 1,8 milliards d’euro accordé aux 54 pays africains, alors que la Turquie recevait à elle seule 6 milliards d’euro, a très rapidement montré ses limites. A peine sept mois après le sommet de La Valette, censé trouver des solutions aux « causes profondes de la migration irrégulière », nous assistons à la naissance d’un nouveau plan de 8 milliards d’euro destiné à quelques pays bien définis et l’annonce pour l’automne d’un nouveau fond d’investissement dans le cadre d’une initiative italienne dite « Migration compact ». Toutes ces nouvelles initiatives viennent démontrer l’échec du sommet de La Valette comme d’ailleurs de tous les précédents projets européens pour mettre fin au drame migratoire. Loin d’œuvrer au développement de l’Afrique ces plans successifs européens, qui ciblent des pays africains se trouvant sur la route des migrants, visent à récompenser les Etats qui mettront en place les mesures sécuritaires les plus restrictives pour empêcher l’arrivée des migrants en Europe. Ces plans font craindre un recul en matière de liberté de circulation sur le continent, en particulier en Afrique de l’Ouest.
Au moment où la CEDEAO des peuples est plus que jamais souhaitée par l’ensemble des hommes et femmes vivant dans cette région, l’Union Européenne ne cesse de mener des politiques visant à briser la fragile union de cette partie de l’Afrique. La pression continue sur les pays d’Afrique de l’Ouest autour de la signature des Accords de Partenariats Economiques (APE) en est encore la triste illustration. Face au refus de certains pays ouest -africains de signer les APE et à la lenteur d’autres à les ratifier, l’Union Européenne vient de menacer de réduire, à compter du 1er Octobre 2016, les préférences commerciales dont bénéficient le Ghana et la Côte d’Ivoire pour l’entrée de leurs productions dans la zone européenne. Or il est reconnu que les APE présentent un danger réel pour l’intégration régionale et l’industrialisation des pays de la sous-région en créant une compétition inégale entre les petites unités de production ouest-africaines et les grosses entreprises européennes.
La société civile togolaise, forte du choix de Lomé pour abriter cette réunion, désire souligner sa consternation sur les conséquences en vies humaines des politiques européennes en Afrique. Cinquante années de coopération au développement n’ont jusqu’ alors produit que plus de chômage, de misère et de conflits sur le continent africain ne laissant d’autres choix aux jeunes que de prendre les routes difficiles et meurtrières des déserts et des mers pour aller vers de nouvelles terres. La société civile, dans sa responsabilité citoyenne, se doit de dénoncer cette situation. L’ONG internationale Médecins Sans Frontières vient d’en donner l’exemple en refusant de recevoir toute nouvelle aide de l’Union Européenne pour dénoncer le caractère dramatique de la politique migratoire actuelle de l’Union Européenne. Il nous appartient en tant que société civile africaine de rappeler aux autorités de nos pays, qui participeront à cette réunion, de tenir un discours juste et sincère à l’endroit des représentants de l’Union Européenne pour un réel partenariat solidaire et respectueux des droits humains entre nos deux communautés.
Fait à Lomé le 17 juin 2016
Contact presse : Samir ABI, Directeur Exécutif de Visions Solidaires, Secrétaire Permanent de l’Observatoire Ouest Africain des Migrations, email : visionssolidaires@gmail.com