Une Première Edition
Par Samir ABI
Les 17 et 18 décembre 2010, s’est tenue la première édition du Forum Social du Togo. La plus grosse déception de cette première édition du forum est la mobilisation. Avec tout le travail de communication fait autour et malgré la forte implication des différents faitières, des organisations de jeunes, de femmes, environnementales… le forum a connu la participation d’un peu de plus de cent militant-e-s. Le rapport reviendra largement sur les difficultés de mobilisation mais de mon point de vue le vrai problème a été la mobilisation étudiante. Le forum commencait le jour ou est tombé la première tranche des aides universitaires allouées par l’Etat. Beaucoup d’étudiants ont donc pris d’assaut les banques pour toucher leur « Z » comme on l’appelle sur le campus. « Primo vivare deinde philosophare… »
Au delà de ce bémol, le forum fut un vrai succès au niveau des débats, des activités, des intervenants, de l’implication de plus d’une trentaine d’organisations, de la participation et de la couverture médiatique. Le niveau des débats a été salué à l’unanimité. Il y a quelques temps encore au Togo on ne pouvait s’attendre à des débats aussi intenses et
contradictoires dans un esprit de partage et de convivialité. Dès la conférence d’ouverture devant porter sur le bilan social de 50 ans d’indépendance du Togo, les deux intervenants, l’historien Assimah Kpatcha et le juriste du CACIT André Afanou, ont été remarquables et ont tenu en haleine pendant près de trois heures un public critique captivé qui ne tarissait pas de questions. Les deux intervenants avaient des bilans opposés, ce qui a fortement enrichi le débat à la satisfaction générale. Cela a permis de démarrer le forum et les ateliers ont également permis de
continuer sur cette lancée.
11 ateliers sur les douze prévus ont pu se dérouler normalement avec en moyenne entre 15 et 30 participants suivant les ateliers. Le dernier atelier que j’ai animé et qui portait sur le Jeu du Sudestan a même connu plus de 40 participants, essentiellement des curieux, car l’atelier se faisait sous les arbres. Beaucoup étaient surpris de découvrir un jeu aussi vivant et qui permet de se cultiver autant. On a même eu la surprise d’avoir un fonctionnaire du Ministère des finances qui y a assisté et a fait un débat dans le debriefing final avec nous sur l’initiative PPTE. Il a quand même reconnu « les énormes sacrifices » que le Togo a dû faire pour atteindre l’initiatve PPTE. Le Togo vient d’atteindre le point d’achèvement et dans les médias actuellement à Lomé on ne fait que chanter cela. Nous sommes largement revenus sur cela lors du forum.
Nous avons eu à intervenir dans trois ateliers lors du forum. A part l’atelier sur le Sudestan, nous sommes également intervenus sur la question du changement climatique, de la dette écologique et de la justice sociale en collaboration avec l’ONG Jeunes Volontaires pour l’Environnement. On est revenu sur les négociations de Cancun et la question de la responsabilité historique du Nord et du système capitaliste.
Le second atelier dans lequel nous sommes intervenus portait sur la migration et la célébration des vingt ans de la convention sur le droit des travailleurs migrants. Nous avons animé cet atelier en collaboration avec l’association togolaise des expulsés qui ont porté un témoignage sur la situation des migrants togolais en Allemagne. Nous avons eu également la surprise, dans cet atelier, d’acueillir des invités de la diaspora togolaise et sénégalaise vivant en France de passage au Togo pour une activité avec l’association AFEL. Nos frères de la diaspora ont eu également à apporter leur contribution au débat dans cet atelier. Cet atelier a connu également la participation d’invités du Niger et du Bénin qui sont revenus sur la question de la libre circulation dans l’espace CEDEAO. Les débats ont porté sur les droits des migrants et la question de la réciprocité des politiques sur les visas. Cet atelier nous a permis d’animer pour la première fois au Togo, le jeu¨« Parcours de Migrants ».
Nous avons assisté à l’atelier sur le genre, animé par le GF2D, la plus grosse structure féministe du Togo. L’atelier a essentiellement porté sur la question de la responsabilisation sociale des femmes.Quelques échos reçus de l’atelier sur l’efficacité de l’aide nous ont fait savoir que le rôle des ONG et leur corruption de plus en plus marquée ont été très critiqués. L’atelier sur l’accaparement des Terres a également mis le doigts sur le laisser-aller général dans l’acquisition des terres et le fait que des villages entiers sont en train de disparaitre au Togo à cause de ce phénomène. L’acquisition massive des terres au Togo est surtout le fait pour le moment d’entrepreneurs privés nationaux et de
membres du gouvernement. Enfin, l’atelier sur le SIDA a été un des ateliers les plus réussis.
Rendez-vous est pris pour l’année prochaine, mais à l’heure du bilan, pour cette première édition, c’est la satisfaction. La mobilisation des mouvements sociaux togolais pour le FSM de Dakar et les caravanes a été lancée. Dans la soirée de samedi un échange par skype a eu lieu entre dix jeunes ayant participé au Forum social du Togo et le comité
d’organisation de « Dakar Etendu » au Sénégal.